Colosse tors au talus
de silex, argile et fougère
traverse plus
sereinement l’hiver
que moi
sur le chemin
du Chardonnet
Charme gris
s’ocelle de blanc
de vert
Moussu, enlierré
vieillard aux jeunes rameaux
rêve des formes
au long cours
Le bric-à-brac de Jean-Baptiste Evette
site personnel
Méditations poétiques sur des arbres remarquables ou ordinaires et quelques « mauvaises herbes »
Colosse tors au talus
de silex, argile et fougère
traverse plus
sereinement l’hiver
que moi
sur le chemin
du Chardonnet
Charme gris
s’ocelle de blanc
de vert
Moussu, enlierré
vieillard aux jeunes rameaux
rêve des formes
au long cours
Abord : des eaux de la Colombe
au col du Royet
sept cents mètres de dénivelé
monde végétal gradué :
sous-bois feuillus
source de menthe sauvage
cailloux et pommes de pins
chênes tors
raidillon des beaux hêtres
jusqu’aux prairies d’altitude
sèches et fleuries
couronnées d’un buis
épargné par la pyrale
Mi-pente un arbuste
smoke tree dit l’anglais
s’empanache de fumées
d’aigrettes mousseuses
aériennes, du blanc au rose
sauvagement raffinées
au-dessus de feuilles
ovales, vernissées
plus érigées que tombantes
Continuer la lecture de « Sumac fustet — arbre à perruques »
ll y a tout d’abord la joie
simple, juvénile
d’apprendre à la nommer
de se mettre un nouveau mot
en bouche,
même si la plante est toxique
Heureusement, on ne s’empoisonne pas
en proférant le nom d’une plante
vénéneuse
Arbuste ou buisson
à l’écorce du brun au gris
aux feuilles assez semblables à celles de l’aulne
constellé de fausses cerises d’août
plus petites, rouges puis noires
C’est la forêt de Bercé qui m’a offert
ma première bourdaine
Autre extrémité de l’ancienne
forêt géante des Carnutes ?
Ses chênes doivent aider
à couvrir le nouveau toit
de Notre-Dame de Paris
La bourdaine, buisson d’Europe
est considérée comme étrangère
invasive
aux États-Unis et au Canada
mais protégée en Irlande
Ce n’est pas un Maure blanc
morus alba
mais l’arbre le plus exotique
d’une enfance
à dévaler l’été
les chemins caillouteux
ivre d’une liberté
inconnue dans nos villes
Toujours un arrêt
à l’ombre dense
sous le feuillage épais
d’un arbre trapu et courtaud
taillé en têtard ou cabasso
que je savais étranger
Le mûrier blanc
gorgé de sucre à l’été,
bonbons spontanés
arbre de cocagne
tachait le sol d’écarlate ou de pourpre
fruits rouges ou blancs saturés de chaleur
de guêpes et de bourdonnements
que personne ne se mêlait de manger
sauf les insectes, les oiseaux et nous
Le gentilhomme ardéchois
et résolument huguenot
écrivain d’antan
dont je fréquente souvent
le Théâtre d’agriculture
Olivier de Serres
acteur important
de son histoire
critique « la fade douceur » du fruit
et le réserve aux « femmes dégoûtées
enfants et pauvres gens
en temps de famine »
Avant que ne jaillissent les feuilles des arbres, sauvage passagère du printemps, invisible dès l’été, toute une histoire éphémère fleurit, blanche ici, rosée, écarlate ou purpurine ailleurs, belle et frêle comme notre bonheur, pourvu que l’on baisse les yeux.
L’anémone prénommée sylvie comme un songe de Nerval constelle la clairière d’imaginations venteuses et décoiffantes. Anemone nemorosa, rose de mer, rose de Nemo, capitaine du Nautilus, enseveli dans son sous-marin au large de l’île mystérieuse ? Non, plutôt de nemus, « bois » en latin, bois sacré même, d’une sauvagerie surnaturelle, quelquefois visité par une divinité, anémone des bois.
Quel souffle visite en rase-mottes la plate-bande ? Éclose du vent selon la science antique, l’anémone tourne ses pâles pétales vers le soleil et les referme si une pluie trop violente menace ses tiges grêles.
Vénus pleurant sur le corps d’Adonis naaman aurait fait éclore magiquement du sang de son amant, comme bulles de pluie à la surface de l’eau écrit Ovide, ces fleurs de vent.
Un if
Longtemps rétif
à la poésie des conifères
des porte-aiguilles
qui me paraissaient
sinistres et stériles
j’ai marché jusqu’à l’if
« millénaire » de Jauzé
dans la Sarthe
entre ruisseau et bois
heureux et pensif
Sa présence ébouriffante
son tronc vrillé et fendu
l’écorce rougeâtre en écailles
l’importance sauvage
de sa ramure excluait
que l’on fasse fi de l’if
À dire vrai, l’arbre massif
et sombre au cimetière
ne portait pas de cônes
mais des fleurs petites
brunes anémophiles
Somme toute près de l’église
croissant aussi lentement
que houx ou buis
il rappelle aux morts
de l’ouest et du nord
ce que dit au sud
le cyprès d’Italie figuratif :
l’ombre noire du trépas
obscurcit le jour
mais subsiste l’espoir
qu’il ne triomphera pas
toujours de l’amour
D’abord champêtre
bucolique, à la Virgile
car la bergère
Phyllis aime à reposer
sous le coudrier
corylus avellana
occupe un chapitre rustique
du Théâtre d’agriculture
d’Olivier de Serres
C’est si simple
si familier
la coudraie
son ombre légère
et translucide
d’un vert tendre
jeune, nervuré, gaufré
tendu sur des gaules souples
J’étais tout petit
et nos grands-parents
appelaient cupressus
les arbres de la haie
orthogonale
à la route côtière
vers Mesquer
Leur parfum était frais
leurs fruits ronds
durs et odorants
leur ombre profonde
leur hauteur impressionnante
La distinction apportée
par ce nom latin
me paraissait aller de soi
Ayant déjà inventé
nostalgie des neiges d’antan
pour un roman tumultueux et triste
une fille à soldats acide
surnommée Sorbe
il fallut pourtant rencontrer
l’arbre en été
près de la Ferté-Vidame
en lisière d’une forêt
malmenée par la sécheresse
pour me consacrer
à l’arbre sorcier
et célébrer ses noces
avec l’oiseau
Comment penser
l’un sans l’autre ?
Malgré festons
et guirlandes
ou souvenirs de Tarzan
cette liane d’Occident
liorne, jorne
inquiète quelquefois
Comme ronces et orties
un serpent végétal
rampille, fausse vigne
envahit maison ruinée
sous-bois obscur
terrain abandonné
Signe de sauvagerie
sarmenteuse
barbe de chèvre
ses tiges ligneuses
tombent en tout sens
Son pétiole vrille
s’attache
tourne
volubilement