Vers 1900, Jehan Rictus

Quand tout l’ mond’  doit êt’ dans son lit

Mézig trimarde dans Paris,

Boïaux frais, cœur à la dérive,

En large, en long, su’ ses deux rives,

En Été les arpions brûlés,

En Hiver les rognons cinglés,

La nuit tout’ la Ville est à moi,

J’en suis comm’ qui dirait le Roi,

C’est mon pépin… arriv’ qui plante,

Ça n’ peut fair’ de tort à la Rente.

 

À chacun son tour le crottoir.

J’ vas dans l’ silence et le désert,

Car l’ jour les rues les pus brillantes,

Les pus pétardièr’s et grouillantes,

À Minoch’ sont qu’ des grands couloirs,

Des collidors à ciel ouvert.

 

J’ suis l’Empereur du Pavé,

L’ princ’ du Bitum’, l’ duc du Ribouis,

L’ marquis Dolent-de-Cherche-Pieu,

L’ comt’ Flageolant-des-Abatis

L’ baron de l’Asphalte et autres lieux.

J’suis l’baladeur… le bouff-purée,

Le rôd’-la nuit… le long’ ruisseaux,

Le marque-mal à gueul’ tirée

Le mâche angoiss’… le cause-tout haut.

 

Jehan Rictus, Les soliloques du pauvre, « Les Masons ».

Laisser un commentaire