Comment faire pour
que cette encyclopédie
des arbres en vers de mirliton
grimpe plus haut
avec davantage de panache ?
Sans doute lui faut-il
pour s’animer
une ponctuation fugitive
rousse ou noisette
virgule de l’arbre
point d’interrogation ébouriffé
qui l’escalade si vite
qu’on peine à le voir
et davantage à l’écrire
De temps en temps
je le vois descendre
le tronc d’un grand frêne
pour boire dans la Coudre
É dans l’abécédaire enfantin
il en va de l’écureuil
comme des petits oiseaux
il n’aime pas rester
là où l’on peut l’observer
et vaque à l’opposé
Non sans raison
puisqu’on l’a écorché
pour faire cols, manchons
ou chaussons de Cendrillon
et pinceaux petit-gris
ou même chassé et cuisiné
en sanquette au vin d’Arbois
ou capturé comme animal familier
à faire tourner dans une roue
Il ignore sans doute que
depuis l’an deux mille sept
il est entièrement protégé
et qu’il est défendu
même de le perturber
Buffon écrivait déjà
« joli petit animal
qui n’est qu’à demi sauvage
et qui, par sa gentillesse
par sa docilité
par l’innocence de ses mœurs
mériterait d’être épargné »
Fascinés par sa queue fournie
les Anciens pensaient
qu’il s’en servait comme parapluie
comme ombrelle
ou même de voile
juché sur une écorce
pour traverser l’onde
On l’appelait aussi « fouquet »
et le surintendant des finances
dans son château de Vaux
l’adopta sur son blason
avec la devise
Quo non ascendet
« Jusqu’où ne montera-t-il pas »
avant que la Caisse d’épargne
en fasse son logo
Mais son vrai trésor
de pignons, faînes, glands, noix
cachés pour l’hiver
en fait aussi un ingénieur
planteur d’arbres
chaque fois qu’il oublie son dépôt
Photo Sylvie Pilet et illustration Rojankovsky pour Flammarion

