Encore un poème de Ginsberg et un supermarché

(Ça me fascine; j’ai bien l’impression que nous manquons de poèmes qui évoquent les supermarchés.)

UN SUPERMARCHÉ EN CALIFORNIE

Voilà ce qui me vient à ton propos ce soir, Walt Whitman, car j’ai arpenté les contre-allées, gêné par un mal de tête, et j’ai regardé la pleine lune à travers les arbres.
Fatigué et affamé, cherchant des images à consommer, je suis entré dans un supermarché aux fruits de néon, en rêvant à tes énumérations !
Quelles pêches et quelles éclipses ! Des familles entières qui font leur course en pleine nuit ! Des allées pleines de maris ! Les femmes dans les avocats, les bébés dans les tomates — et toi, Garcia Lorca… Que faisais-tu parmi les pastèques ?
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« America », d’Alan Ginsberg

Il s’agit d’un poème que j’admire parce qu’il est drôle, parce que sa forme est ouverte et ne s’adonne à aucune circularité musicale de rime ou de sonorité, parce que c’est un poème qui marche et qui danse, toujours avançant, riant et mordant. Il y a sur un site anglo-saxon un très bel enregistrement où Ginsberg le récite et où le public rit beaucoup. (www.poetryarchive.org)

AMÉRIQUE

Amérique, je t’ai tout donné et maintenant je ne suis plus rien.
Amérique, deux dollars et vingt-sept cents, le 17 janvier 1956.
Je ne supporte plus mes pensées.
Amérique, quand mettrons-nous fin à la guerre humaine ?
Ta bombe atomique, tu peux te la mettre dans le cul,
Je ne me sens pas bien, laisse-moi.
J’écrirai mon poème quand je serai dans l’état d’esprit qui convient.
Amérique, quand deviendras-tu angélique ?
Quand te mettras-tu à nu ?
Quand regarderas-tu ta mort en face ?
Quant te montreras-tu à la hauteur de ton million de trotskystes ?
Amérique, pourquoi tes bibliothèques sont-elles pleines de larmes ?
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