Laëtitia d’Ivan Jablonka ou la prétérition

Malgré ses qualités indéniables, il est bien possible que Laëtitia ou La Fin des hommes d’Ivan Jablonka repose essentiellement sur une seule figure de style, la prétérition, qui annonce qu’on va taire quelque chose pour fournir l’occasion de le dire. L’Oraison funèbre de Turenne de Fléchier en donne un exemple éclairant.

« N’attendez pas, Messieurs, que j’ouvre ici une scène tragique ; que je représente ce grand homme étendu sur ses propres trophées, que je découvre ce corps pâle et sanglant auprès duquel fume encore la foudre qui l’a frappé ; que je fasse crier son sang comme celui d’Abel et que j’expose à vos yeux les tristes images de la Religion et de la Patrie éplorée. »

Quoique le texte s’en défende, rien ne nous est réellement épargné du massacre et du démembrement de la jeune fille. Moralement, la prétérition est aussi l’outil rhétorique du Tartuffe, celui qui s’exclame « Couvrez ce sein que je ne saurais voir » et fait surgir dans l’espace du texte l’objet de sa convoitise en réclamant qu’on le cache.

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